Double anniversaire miroir : un restaurant parisien renommé pour ses poissons et ses vins, La Cagouille, fête ses trente ans et deux compères gourmets choisissent d’arroser vingt ans de complicité sur les nappes blanches (au moins en début de repas). Cela donne Ironie et gastronomie, une exposition rassemblant les dessins de J-P Desclozeaux pour Le Monde commentés par J-C Ribaut qui pendant vingt ans mitonna la chronique gastronomique dudit Monde. A consommer sans modération et sans limite d’âge.
Pendant vingt ans (1992-2012), Jean-Claude Ribaut à la plume et Jean-Pierre Desclozeaux au pinceau ont servi leurs lecteurs à la table hebdomadaire du journal Le Monde.
J.C. Ribaut a fait bouger les recettes traditionnelles, disons-le, bourgeoises, de la chronique gastronomique. Au partage de la dégustation il a ajouté une pincée d’intelligence culturelle du plat, voire de perspective sociale, sans jamais manquer un clin d’œil historique ou un tantinet coquin. Le tout dans un style littéraire où l’abréviation numérique ostrogothesque et le prédicat n’avaient pas encore sévit. Un verbe d’avant le carême de la langue.
J-P Desclozeaux est toujours venu poser un cheveu de son talent sur la soupe de Ribaut. Quelquefois, je me demande s’il ne fait pas de ses poils de barbe des pinceaux fins pour ajouter de l’onirique à la poésie espiègle de ses dessins. Sa mine révèle chez des gros balourds, voire des cons, d’insoupçonnables légèretés. Bref, on évite de boire d’un trait un Desclozeaux, il mérite qu’on le lappe au taste-dessin.
Le couple continue de servir les papilles et l’esprit dans Siné mensuel.